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islam en France, 1830-1962

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  • Pratiques religieuses musulmanes, Mosquée de Paris, Si Kaddour ben Ghabrit, histoire coloniale et islamophilie, Société des habous, jeûne de ramadan, aïd el-kebir, aïd el-sgheir, cimetière musulman, Sainte-Marguerite
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islam en France, 1830-1962
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17 janvier 2011

une kouba en métropole (1919-2011)

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la kouba de Nogent (1919)

reconstruite en 2010 et inaugurée en 2011

Michel RENARD



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la kouba dans le carré musulman à Nogent-sur-Marne en novembre 2010


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la kouba dans le carré musulman à Nogent-sur-Marne en novembre 2010

 

À l'été 2004, aux archives d'Outre-mer, à Aix-en-Provence, poursuivant mes recherches sur la présence musulmane en métropole, j'ai découvert une correspondance entre Émile Piat, consul en région parisienne, responsable des formations sanitaires accueillant des combattants de confession musulmane, et le capitaine Jean Mirante, du service des Affaires indigènes à Alger. Il était question de l'édification d'une kouba en l'honneur des soldats musulmans de l'armée française morts lors de la séjour à l'hôpital de Nogent-sur-Marne.

J'ai expliqué ici ce qu'était une kouba et les épisodes de cette histoire, l'inauguration du monument en 1919, ainsi que les démarches entreprises pour tenter de la faire reconstruire après son écroulement dans les années 1980. Avec mon ami Daniel Lefeuvre, professeur à l'université Paris-VIII, nous avons multiplié les initiatives (surtout lui ces dernières années) qui ont fini par aboutir après un appui initial du président Nicolas Sarkozy (la Gauche se foutant carrément de cette affaire, bravo les défenseurs des immigrés...!) :

- Appel et souscription pour le reconstitution de la kouba de Nogent-sur-Marne (2007)

- Projet de reconstitution de la kouba (1919) du cimetière de Nogent-sur-Marne (Michel Renard, 2005)

- Versets du Coran sur la kouba de Nogent

- Lettre adressée à Hamlaoui Mekachera (9 mai 2005)

- Lettre adressée à Dalil Boubakeur (10 mai 2005)

- Réponse de Dalil Boubakeur (24 mai 2005)

En 2004, j'avais retrouvé le marbrier, descendant de celui qui avait bâti la kouba et tout a commencé comme cela. Aujourdhui, la kouba a été reconstruite.

Elle avait été édifiée à la fin de la Première Guerre mondiale grâce à une conjonction d'initiatives : la politique de gratitude et de reconnaissance de l'institution militaire à l'endroit des soldats venus du domaine colonial, l'empathie d'un consul entreprenant et l'entremise d'un officier des affaires indigènes en poste à Alger, le soutien d'un édile communal et la générosité d'un marbrier. Cette osmose dépasse toute politique d'intérêts au sens étroit.

C'est ce surplus de signification qui en fait un symbole d'une mutuelle reconnaissance qui a toutes raisons d'être rappelée aujourd'hui.

Michel Renard

 

 

- blog sur la reconstruction de la kouba de Nogent-sur-Marne

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11 octobre 2010

un documentaire sur l'histoire des musulmans en France

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Musulmans de France :

un documentaire en trois épisodes (2009)

 

Être musulman dans la France d’aujourd’hui, c’est hériter d’une histoire tumultueuse, écrite au fil du temps par des Maghrébins et des Africains venus ici pour combattre ou travailler. Grâce à de nombreux témoignages et images d’archives, cette trilogie documentaire apporte un éclairage sur un siècle de présence musulmane, de l’arrivée de Kabyles dans les mines du Nord en 1904 jusqu’en 2007.

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Musulmans de France - Indigènes : 1904-1945

  • Genre : Documentaire - Culture Infos
  • Pays : France
  • Nationalité : français
  • Date de sortie : 2009
  • Durée : 1h
  • réalisateur : Emmanuel Blanchard, Karim Miské, Mohamed Joseph
    Production : COMPAGNIE DES PHARES & BALISES
    Participation : FRANCE TÉLÉVISIONS
           

En 1904, 5000 musulmans travaillent en métropole, à Paris, Marseille ou dans le Nord. La Première Guerre mondiale en fait des soldats et, en 1918, le bilan est lourd pour ces militaires. Au lendemain du conflit, la France salue le sacrifice des troupes coloniales et, en 1926, la construction de la Mosquée de Paris débute. Cette politique islamophile de prestige se heurte à la situation des 100 000 musulmans venus reconstruire le pays. Mal logés, en mauvaise santé, considérés comme dangereux, ils sont tenus à l'écart du reste de la population. Une police spéciale, la brigade nord-africaine, traque sans relâche les premiers indépendantistes menés par Messali Hadj.

La guerre d'Algérie va pour un temps ostraciser les populations maghrébines vivant en métropole. Dans les années 60 de la croissance économique, ils sont désormais des immigrés. Des travailleurs africains les rejoignent.

Dans les années 80, la génération de ceux nés en France revendique sa place dans la société. Les espoirs seront vite déçus et une partie des jeunes en plein désarroi se replie sur l'identité musulmane. Dans les années 2000, la confusion dans les esprits s'amplifie entre pratique de la religion et radicalisme religieux...

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- présentation des trois épisodes sur ina.fr et extrait du premier

- un extrait [avec 30 secondes de pub débile...!!] du premier épisode avec images filmés de travailleurs algériens dans la rue d'Aubagne à Marseille en 1920, et interwiew de Mohamed Zenaf (de Saint-Chamond) dont le grand-père est venu en France au tout début des années 1900 :

http://www.dailymotion.com/video/xbvstn_musulmans-de-france-extrait-1-ep1_news

 

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19 février 2010

émission "France 5" le mardi 23 février à 20 h 35

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un siècle de présence musulmane

en France


documentaire de Karim Miske

diffusé sur France 5, le mardi 23 février 2010, à 20 h 35

 

* bande-annonce

• Ce triptyque est librement inspiré du livre Histoire de l'islam et des musulmans en France du Moyen Age à nos jours, ouvrage collectif sous la direction de Mohammed Arkoun (éditions Albin Michel).

* extraits vidéo

À revoir en DVD

 

Un double DVD de Musulmans de France sera en vente le 11 mars. Edité par France Télévisions Distribution, ce coffret regroupe les trois épisodes de la série documentaire et propose, en bonus, une interview du réalisateur Karim Miské, un making of de la musique originale et des sous-titres pour sourds et malentendants.

 

présentation officielle

Etre musulman dans la France d'aujourd'hui, c'est hériter d'une histoire tumultueuse, écrite au fil du temps par des Maghrébins et des Africains venus ici pour combattre ou travailler. Grâce à de nombreux témoignages et images d'archives, cette trilogie documentaire apporte un éclairage sur un siècle de présence musulmane, de l'arrivée de Kabyles dans les mines du Nord en 1904 jusqu'en 2007. Au début de cette émission spéciale et entre chaque volet de la série, Carole Gaessler recevra un invité en plateau.


Episode 1
Indigènes : 1904-1945

 

Episode 1 Indigènes : 1904-1945

En 1904, 5 000 musulmans travaillent en métropole, dans les usines de la capitale, les savonneries marseillaises ou les bassins miniers du Nord. La Première Guerre mondiale en fait des soldats. Venus d'Afrique du Nord et d'Afrique noire, ils découvrent la France dans les tranchées de Verdun. En 1918, le bilan est lourd pour ces troupes : 80 000 morts, autant de blessés. Au lendemain de la guerre, la France salue le sacrifice des troupes coloniales : elle est fière d'être un «grand empire musulman».
Pour preuve, la construction de la mosquée de Paris, en 1926, et les honneurs réservés à son premier recteur, Si Kaddour Ben Ghabrit, musulman d'Algérie et haut fonctionnaire du Quai d'Orsay. Mais cette politique islamophile de prestige doit être confrontée à la situation des 100 000 musulmans venus reconstruire le pays. Mal logés, en mauvaise santé, considérés comme dangereux, ils sont tenus à l'écart du reste de la population. L'hôpital «franco-musulman» qui leur est exclusivement réservé est étroitement lié aux services de police. Une police spéciale, la brigade nord-africaine, traque sans relâche les premiers indépendantistes menés par Messali Hadj. Car la politisation fait son chemin… Et lorsque la Seconde Guerre éclate, la France recrute à nouveau massivement dans ses colonies.

Episode 2
Immigrés : 1945-1981

 

Episode 2Immigrés : 1945-1981

L'année 1945 marque le début d'une nouvelle ère : celle de l'enracinement. La vie des travailleurs algériens et marocains s'organise désormais autour des cafés, des hôtels, des épiceries… Leurs épouses les rejoignent. Des enfants naissent en France. Tous prennent de plein fouet la guerre d'Algérie, qui éclate en novembre 1954 et s'exporte en France, où les attentats se multiplient. Pour les autorités, les Nord-Africains sont désormais des suspects, sans distinction. La répression policière atteint son paroxysme lors de la manifestation du 17 octobre 1961 : une centaine d'Algériens sont assassinés en une nuit. Bien que chèrement gagnée, l'indépendance n'inverse pas les flux migratoires.
Les Algériens continuent d'affluer massivement vers la France et ses bidonvilles, où ils sont désormais des immigrés. Sur fond de misère, le fossé se creuse avec leurs enfants, qui grandissent en France, fréquentent les écoles de la République et s'immergent dans la culture française. Mai 1968 fait surgir la « question immigrée » dans le débat public et suscite une vaste campagne de relogement dans des foyers et des HLM. L'opinion découvre alors la présence discrète des travailleurs africains, pour la plupart des musulmans venus du Sénégal, du Mali et de Mauritanie. Mais les années 1970 restent celles d'un interminable après-guerre d'Algérie : crimes racistes, drame des harkis parqués dans des camps… Au seuil des années 1980, les enfants d'hier sont devenus des adolescents. La France, qui ne les a pas vus grandir, va bientôt apprendre à compter avec eux.

Episode 3
Français : 1981-2009

Nés en France, ceux que l'on appelle «beurs» entrent dans l'âge adulte en pleine crise économique. Leur culture est métissée, entre école de la République et traditions familiales venues du «bled». Cette génération revendique sa place. Face à la recrudescence des crimes racistes, les jeunes Arabes des banlieues débutent en 1983 une Marche pour l'égalité et contre le racisme (ou Marche des beurs) qui rassemble plus de 100 000 personnes à son arrivée à Paris. Leurs espoirs seront vite déçus… La fin des années 1980 est marquée par la montée du Front national. En réaction, une partie de ces jeunes, en plein désarroi, se replie sur l'identité musulmane.
C'est le début de l'affaire du voile (1989). A l'été 1995, une série d'attentats secoue la France. Khaled Kelkal, un jeune de Vaulx-en-Velin, devient l'ennemi public numéro 1. La confusion entre pratique de l'islam et islamisme s'amplifie. Dans les cités, jeunes Arabes et jeunes Noirs inventent, à partir du hip-hop américain, une contre-culture qui devient culture de masse. S'ouvre alors une période paradoxale. Alors que le pays célèbre dans l'hystérie les couleurs black-blanc-beur de 1998, la seconde Intifada (2000) devient un combat de substitution pour certains jeunes désorientés qui s'en prennent à la communauté juive.
L'effondrement des tours jumelles en 2001 achève de stigmatiser les musulmans. À un moment où, pourtant, l'expression «musulmans de France» prend tout son sens. Au point que, en 2007, l'entrée au gouvernement de trois femmes issues de l'immigration — Rachida Dati, Fadela Amara et Rama Yade — apparaît à beaucoup comme aussi nécessaire que tardive.

 

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11 novembre 2009

Le caveau des poilus musulmans de 14-18, à La Mulatière

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le caveau oublié

des poilus musulmans de 14-18

à La Mulatière (Lyon)

 

IDENTITES - La sonnerie aux morts résonnait, particulièrement émouvante mercredi, dans ce petit cimetière de la Mulatière. Près des drapeaux tricolores se tenaient deux imams et le recteur de la mosquée de Lyon. Soutenu par la mairie, un hommage à des soldats musulmans longtemps oubliés, qu'un historien amateur a retrouvé. C'était l'été 2006. Frédéric Couffin travaillait alors sur les soldats français de 14-18.

Le fossoyeur de la Mulatière, qui le voyait souvent rôder près du monument aux morts, lui a dit un jour : "Au fond du cimetière, il y a un caveau bizarre que personne ne connaît, ça devrait vous intéresser". L'histoire a commencé ainsi...

L'historien est allé au fond du cimetière et il y a découvert un curieux monument, d'inspiration orientale. Envahie d'herbes folles, la stèle portait une niche ogivale, sous un très marocain petit toit de tuiles vertes. Sur une plaque de marbre était écrit : "Aux morts musulmans pour la France - 1914-1918". Aucun nom, aucune date. L'historien a pensé à un mausolée, personne ne savait lui dire de quoi il s'agissait.

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Intrigué, il a commencé à fouiller les archives. Et découvert en quelques mois que 201 soldats étaient enterrés là. Oubliés. Frédéric Couffin a retrouvé une à une les identités, retracé le parcours de la plupart de ces hommes, avant d'écrire l'histoire très instructive du caveau de la Mulatière. Une histoire, glisse Kamel Kabtane, qui rappelle qu'une nation comme la France est composée de multiples identités.

Pendant la Grande guerre, cette boucherie, Lyon et sa banlieue, situés très en arrière du front, accueillaient plus de 70 unités hospitalières, pour une part improvisées, dans le lycée d'Oullins par exemple. De nombreux soldats gazés sont venus s'y faire soigner, et parmi eux des musulmans, troupes de l'Empire appelées à la rescousse pour remplacer les hommes tombés au front. D'autres, ouvriers, sont venus travailler dans les usines d'armement qui se trouvaient au Sud de Lyon, notamment dans le quartier de l'Artillerie de Saint-Fons, et certains y sont morts sous des bombardements.

À partir de 1916, l'armée demande aux mairies du coin de bien vouloir réserver des carrés musulmans dans leurs cimetières, pour inhumer leurs soldats qui meurent dans les hôpitaux. La Mulatière en accueille 72 la première année et le gardien, fin septembre, demande une augmentation de salaire pour creuser les fosses des musulmans. La mairie refuse, et s'assure que ces hommes sont bien enterrés selon leur rite, les pieds tournés vers la Mecque notamment.

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mairie de La Mulatière

Dès l'été 1916, les tombes alors individuelles de ces soldats morts loin de chez eux sont fleuries par les habitants de la Mulatière comme celles des enfants du pays morts pour la France. Les écoliers et les anciens combattants de 1870 s'en chargent, effeuillant le 1er novembre des fleurs sur leurs stèles. Le 16 novembre 1918, cinq jours après l'armistice, l'armée demande un dernier carré pour 50 hommes. Au total, 202 auront été enterrés là en trois ans.

Pendant les premières années après guerre, les habitants continuent de soigner leurs morts musulmans. Ils ne sont bientôt plus que 201 car une famille tunisienne, recherchant son fils, l'a trouvé là, et a obtenu le rapatriement de ses restes. Le ministère des Pensions alloue 4 francs par tombe pour l'entretien, mais il n'accepte de prendre en charge les concessions perpétuelles que pour les soldats, et les ouvriers pris sous les bombardements de l'ennemi dans les usines de munitions. Ceux-là sont "morts pour la France". Ils sont 113.

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Oullins, ateliers de La Mulatière

Pour les 88 autres, rien n'est prévu. Le maire décide alors de faire construire un caveau commun, avec un monument. Mais le ministère n'est pas chaud. Les carrés lui suffisent. Paul Nas prend alors contact avec le premier recteur de la Mosquée de Paris, également président de la Société des Habous des lieux saints de l'Islam, sorte de CFCM avant l'heure...

Un architecte de la région lyonnaise imagine le monument, amendé par l'un des trois architectes de la Mosquée de Paris, construite en grande partie avec des fonds français pour remercier les musulmans de leur dévouement dans la guerre. La Mosquée de Paris fait parvenir les tuiles vertes, 120 vernissées et 80 non vernissées. Et le caveau est terminé en décembre 1936. Les hommes sont alors exhumés. Le maire aurait voulu réunir tous ces musulmans morts, directement ou non, des violences de cette guerre. Mais le ministère ne plie pas : seuls ceux qui sont officiellement morts pour la France peuvent reposer là. La municipalité installe les autres à côté, dans une fosse commune.

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Le caveau est inauguré le 9 mai 1937, en présence du recteur de la grande Mosquée de Paris. Le Progrès du lendemain rend compte du discours prononcé par le maire. Il y explique son attachement à ces hommes. Avant guerre, il a beaucoup voyagé chez eux. Puis du côté de Verdun, il a partagé leurs tranchées, leurs souffrances. Les a vus découvrir le froid. Maire depuis 1912, Paul Nas veut s'attacher à entretenir ce tombeau. Il le fera jusqu'à sa démission, malade, en 1939. La boucherie suivante commence. Paul Nas meurt peu après.

Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, tout le monde oubliera le tombeau. Seules les herbes folles viendront encore le visiter. Jusqu'à ce que le fossoyeur glisse à Frédéric Couffin, à l'été 2006...

Olivier Bertrand
Libération Lyon, 11 novembre 2009

 

 



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entrée du cimetière de La Mulatière

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cimetière de La Mulatière

 

 

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18 mai 2009

photo des prisonniers algériens sur l'île Sainte-Marguerite

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une photo des prisonniers algériens,

vers 1870-1880

Michel RENARD

 

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cliquer sur l'image pour l'agrandir


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commentaire

Cette photo provient des archives départementales des Alpes-Maritimes (A.D. 06) à Nice. Je l'ai consultée en salle d'archives en avril 2005. Il y a quelque temps, elle était même disponible sur internet. La fourchette chronologique (1870-1880) est fournie par les A.D. et le cliché attribué à Jean Gilletta (1).

Si ce dernier est bien l'auteur, la date ne peut être antérieure à 1880 puisque Gilletta (1856-1933) n'a commencé à travailler qu'à partir de cette année là.

Jusque là, l'image la plus connue des prisonniers algériens sur l'île Sainte-Marguerite était un autre cliché de Gilletta ayant servi à l'édition de cartes postales. Cette image date du début des années 1880 mais une édition propose une légende discutable (voir ici). Il est vraisemblable (mais pas obligatoire, puisque Gilletta habitait Nice tout proche de Cannes) que les deux clichés ont été effectués lors d'une même visite à Sainte-Marguerite.

L'image conservée aux A.D. révèle un autre aspect de la vie des détenus. Il semble que le contact avec les gardiens soit relativement aisé. La photo montre le mélange des prisonniers algériens, des militaires qui les gardent et du personnel civil du fort (un jardinier ?).

Michel Renard

(1) L'orthographe de Gilletta comporte bien deux "l" et deux "t",  mais son nom commercial ne note qu'un "l".


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7 mai 2009

Mosquée de Paris dans "l'Illustration" en 1925

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construction de la Mosquée de Paris

récit et images parus dans l'Illustration en 1925

 

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vue de la rue Geoffroy Saint-Hilaire : à droite le minaret ;
au fond, la coupole de la salle de prière : le long de la rue, le logement du mufti ;
aquarelle de Camille Boiry, 11 juillet 1924



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ouvriers mosaïstes


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le patio central
aquarelle de Camille Boiry, 15 juillet 1925

aquarelles de A. Boiry
- en réalité il s'agit de Camille Boiry

La mosquée à Paris

Dans le même temps que l'Exposition des Arts décoratifs s'épanouit sur les bords de la Seine, en une floraison nombreuses mais destinée à disparaître, là-bas, aux régions lointaines du Jardin des Plantes, la mosquée à Paris se parfait. Cet édifice demeurera en témoin d'une alliance morale, en modèle aussi, unique à Paris, d'un art délicieux.

L'Institut musulman, qui va être inauguré sur le terrain de l'ancien hôpital de la Pitié, s'inspire des plus beaux monuments religieux de l'Afrique du Nord. Le curieux d'architecture, recru des visions modernes de l'Exposition, de l'unité d'un style où la suprême étude est celle de la projection des volumes dans l'espace, se demandera peut-être, prenant plaisir aux arcatures moghrébines, pourquoi l'usage de ces formes ne se vulgarise pas.
Dans le sens décoratif, l'art arabe est en réaction sur les directives actuelles. Il s'agit en effet aujourd'hui de permettre au moyen d'un machinisme bien compris, que le meuble et le décor d'architecture, harmonieux de ligne, intelligent des nécessités de la vie et du confort, soient mis à la portée de tous.

L'art d'Islam, au contraire, qui n'a pas varié depuis la splendeur des époques espagnoles, n'a pas cessé non plus de demander la main d'oeuvre dans laquelle, à la fin du dix-neuvième siècle, la doctrine ruskinienne voyait un renouveau de l'art. Ce style, qui tout d'abord ravit par la simplicité des lignes, exige en fait la richesse la plus profuse dans le travail de la matière circonscrite aux masses générales. L'extrême recherche du détail, sans qu'il y paraisse, détermine l'impression d'ensemble. À Fez, Marrakech, à Kairouan comme à Grenade et à Cordoue, le stuc ne va pas sans dentelle, le cèdre sans délicate fouillure et les parois sans mosaïques. Aujourd'hui, comme aux flamboyants treizième et quatorzième siècles, des hommes finissent ces ornements dont la machine trahirait l'élégance.

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Ces ouvriers musulmans, ces Marocains, par exemple, que nous voyons aujourd'hui parachever la mosquée, mosaïstes, sculpteurs sur bois et sur plâtre, enlumineurs de plafonds, ont accoutumé de travailler avec patience. Ce travail lent et sans nerfs, ils le coupent de longues paresses inhérentes à leur tempérament, de même que le décor qu'ils exécutent est nécessaire à la nudité de ces salles destinées aux heures longues, écoulées dans l'immobilité. Si l'art est un miroir des moeurs, le travail d'art l'est plus encore.

Il ne faut point songer à demander une telle besogne à des artisans européens. La question du salaire est décisive, dont le détail suivant donnera une idée : les murs comportent 1 200 mètres carrés de mosaïque, ou zélige ; dans un mètre carré entrent 13 000 morceaux taillés à la hachette, ajustés un à un dans des carreaux collés à des panneaux de plâtre. Le reste est à l'avenant.

L'Institut musulman ne nous présente donc qu'un document gratuit sur ce charmant art arabe : art de luxe. Un document très vivant, puisqu'il va bientôt protéger la méditation, recueillir des prières, répondant de la sorte à un besoin réel.

Un style ornemental uniforme empreint les patios, les corps de logis divers, et la salle de prières, créant l'atmosphère favorable à l'application de la dévotion coranique dans son essence. Cette religion du confort, cette culture du calme, ce paisible silence, c'est toute une méthode de vivre, c'est l'Islam. Dans les climats où il est maître, les rares personnages qui ont le moyen de s'offrir des demeures décorées dans ce goût fastueux en y vivant seulement, parmi les eaux vives et les fleurs, de presque éternels loisirs, réalisent déjà les promesses du Livre. L'ordonnance de leur temps est une philosophie, et leurs songes une prière.

On pénètre dans l'Institut par la rue Geoffroy Saint-Hilaire et par la place du Puits-de-l'Ermite. Ces deux entrées forment les abouts d'un premier jardin intérieur, non accessible aux voitures, dont les allées carrelées de mosaïque conduisent aux différents corps de bâtiment. Des bassins, vasques et jets d'eau en complètent l'ensemble. Du côté de la place du Puits-de-l'Ermite, les deux pavillons des maisons des hôtes comprennent chacun six à huit chambres pouvant être données à des visiteurs de marque. L'hôtellerie servira aux croyants la cuisine faite selon les règles et selon leur goût. Une salle d'honneur du plus pur style quant à la composition et à l'ameublement conduit d'un côté au logement du mufti (directeur), de l'autre à celui de l'imam (prêtre). Ces divers corps de logis sont séparés par des jardins (3 500 mètres carrés plantés, sur 7 500 mètres carrés de terrain environ).

Les musulmans auront à loisir d'errer dans ces jardins qu'ils aiment, ces jardins arabes aux plates-bandes en contre-bas où, entre les fuseaux sombres des petits cyprès, on fera venir les plantes odoriférantes, le jasmin et le cognassier, s'ils le veulent bien, la menthe. Déjà les magnolias sont en fleurs, tandis que les miroirs d'eau reflètent les nuages.

Ils trouveront les salles de chaleur humide qu'ils estiment nécessaire à leur hygiène, avec les services de masseurs venus du Maroc et de Tunis au hammam, qui s'élève en arrière de la mosquée sur la rue Daubenton. Le groupe de coupoles blanches qui le couronne forme une saisissante apparition d'Afrique, Koubba entr'aperçue dans le silence et la gloire du jour, au fond d'une ruelle bleue : mirage de soleil où manque le soleil. On boira le moka et le thé à la menthe, au café maure. Sur la rue Geoffroy Saint-Hilaire, à l'extérieur, face aux fenêtres du Museum, les quelques boutiques d'un petit souk présenteront à la vente des objets usuels.

La satisfaction de ses habitudes matérielles dans un cadre familier offrira au musulman à Paris une illusion de la patrie. Cet aspect n'est pas le moins intéressant de l'Institut, mais son but principal est de constituer un lieu d'assemblée et de prière : el-jamâa.

Faisant face au jardin d'entrée, une terrasse en surplomb donne accès au vestibule de la partie sainte. La grande porte qui est copiée sur celle de la medersa Bou-Inania, de Fez, est encadrée de caractères coufiques empruntés à Chella (Rabat). Les murs extérieurs, blancs et nus, font ressortir la richesse délicate des tons d'or brun de la corniche en cèdre sculpté.

À droite, une salle d'ablutions se prête aux rites qui précèdent la prière. Et comme l'harmonie commande de satisfaire l'esprit en même temps que le corps, une bibliothèque, à gauche, réunira des ouvrages d'histoire et de théologie, les Commentaires, l'oeuvre de Djebal eddin de Beïdhawi, de Bokhari, du Fazi ; le Livre lui-même et les manuscrits enluminés des savants et des poètes d'Islam, Saadi voisinera avec Averroès.

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Le grand patio central qui précède la salle de prière est clos et découvert. Des dalles en forment le sol ; au centre, d'une vasque de marbre s'élève un jet d'eau. Les murs, dans leur partie basse, sont revêtus de zéliges. Une frise de faïence grattée, brun sur fond brique, fait courir tout autour des versets du Coran, signes épigraphiques sans fin et sans commencement, où l'esprit, distrait aux tracés géométriques des carreaux, se repose et s'égare. Des motifs de stuc fouillé garnissent les murs ; les arcades des galeries couvertes sont surmontées d'une corniche en cèdre sculpté supportant un auvent de tuiles vertes.

À ces lignes, ces couleurs et ces ornements arabesques, il manque ici ce quelque chose qui donne à un style ses chances de rayonnement, sa vérité. C'est l'accord de la lumière. Non que le ciel délicat de Paris soit en désharmonie avec la pureté du plâtre, le vert des tuiles, le fauve du bois odorant, avec le murmure de l'eau qui s'écoule. Fez ou Kairouan ne manquent point de journées grises. Mais pour que le patio pénètre de tout son charme véritable, il faut, entre les faîtes de ses murs, un carré implacable et bleu, il faut que l'embrasement diffus rebrode de stuc, revernisse les faïences et que la chaleur enivrante, qui apaise l'âme et l'endort, la dispose à l'indéfini du rêve.

Voilà pourquoi l'architecture musulmane qui, à l'Institut, nous surprend et nous ravit étrangement, n'a point de chance de se répandre. Le succès d'un style tient à ce que ce style emprunte au paysage. Cet élément, basé peut-être sur des considérations pratiques les dépasse de loin en importance profonde. L'habitude séculaire y est pour beaucoup, sans doute. Nous ne pourrons pas, de longtemps encore, nous empêcher de désirer, sous les moires du ciel, parmi les frondaisons mouillées, la maison de granit bretonne ou le chalet normand ; de préférer, pour le monument qui doit surgir du flottement des nuages et s'envelopper de brumes, le grand degré de l'Orangerie à Versailles, les contours de la place Vendôme à ceux de la porte de l'Exposition sur la place de la Concorde.

L'Institut musulman à Paris veut satisfaire aux âmes qui sont déracinées. En leur rendant le milieu où elles ont pris conscience, il emplit précisément son objet.

* * *

 

La salle de prière contiendra de 500 à 600 fidèles. Soutenue par cinquante-six colonnes, une grande coupole de cèdre sculpté, au centre, enchevêtre ses poutraisons sur arcs de stalactites de stuc. Le jour, qui sort des fenêtres de la coupole, caresse doucement la teinte naturelle du bois, simplement frotté d'huile. En dessous des claustras voilés de dentelles de stuc, la lumière sort filtrée, qui s'unit à l'odeur du bois précieux. Un mihrab très décoré indique la direction de la Mecque. La chaire à prêcher (le minbar), en cours de fabrication à Tunis, reproduira celle de la mosquée de Kairouan. Le bas des murs zéligés à mi-hauteur, sera revêtu de paillassons à dessins, le sol calfeutré de tapis de laine et, au soir, des lampes d'argent et de métal ouvrées en pays musulman répandront une lueur amortie.

Dans ce sanctuaire, les vingt-cinq à trente mille musulmans épars dans Paris pourront s'assembler le vendredi et tous les jours aux heures de la prière. Le feront-ils ? Il faut le souhaiter ardemment. Les pauvres sidis de Grenelle, que notre civilisation, qu'ils résument dans l'alcool, déprave, traverseront-ils Paris immense pour venir calmer en ces lieux leur vie exaspérée ?

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À l'angle de la rue Quatrefages, le minaret domine de 26 mètres la place du Puits-de-l'Ermite. Il comprend un escalier intérieur à larges emmarchements, non pas aussi larges que ceux de la tour Hassan à Rabat, que le sultan pouvait gravir à cheval. Mais, comme au minaret de la mosquée des Libraires, qui s'élance des terrasses de la capitale du Sud, les trois boules d'or brillent à son sommet. Des frises de faïences, volontairement pâlies, le découpent sur le ciel pâle.

Le moueddin y montera crier le fedjr à l'aube, el-sobh au matin, ed-dohr vers midi, el-acer de 3 à 4 heures, el-moghreb, el-aacha avant et après le coucher du soleil.

Les ondes de sa voix gutturale, sons que l'on n'oublie jamais quand on les a entendus, vibreront au-dessus de l'arrondissement de Paris qui porte le plus ancien sol de notre histoire : vers cette île de la Cité qui limitait la ville gauloise, vers les arènes de Lutèce et les thermes de Julien, vers les vestiges des remparts de Philippe-Auguste et du palais de Saint-Louis. La rue Mouffetard fourmillante, la gaieté, l'énergie de Paris qui travaille s'étonneront de cette clameur. En lançant son appel aux quatre coins de l'horizon, le moueddin verra se presser alentour les toits, les cheminées au-dessus desquels le dôme des Invalides et celui du Panthéon dessinent dans la nue leur majesté inhabituelle à ses yeux. De nul minaret, nulle voix, comme il a coutume de l'entendre, ne renverra l'écho de son effort, et il pourra se demander si son affirmation - le Prophète est l'envoyé de Dieu - et si son ordre : "Venez, venez pour notre bien !" atteindront toutes les oreilles coreligionnaires.

Il n'en sera rien. Les vibrations émises par son miraculeux gosier, résonnant sur les murs austères du Museum, s'égareront parmi les plantes du Jardin et se perdront au fil de la Seine verte et grise. Les tours antiques de Notre-Dame n'en seront point offensées. N'est-elle pas bienfaisante, la pensée qui fait s'envoler sur Paris une prière encore ? [1] N'est-il pas favorable à la ville enfiévrée, malgré sa forme exotique et païenne, cet appel vers quelque chose de plus haut, de plus pur et de plus durable que l'est la vaine agitation des corps ?

Les musulmans auront de la reconnaissance pour le pays et la grande ville qui, en permettant l'édification de l'Institut, leur ont ménagé cet asile spirituel. Nul geste de propagande, mieux que celui-ci, ne peut émouvoir les esprits et les coeurs. Il est permis de prévoir un effet en retour de cette propagande. Ce beau monument, qui suggère une civilisation conquérante d'une grande partie du monde, ne sera pas sans susciter une curiosité ardente à quelque citoyen du quartier et de Paris.

La badauderie va bientôt s'amuser tout d'abord des personnages en caftan et en beurnouss qui sillonneront les rues avoisinantes : "C'est une chose bien extraordinaire ! Comment peut-on être Persan ?..." Paris est toujours jeune et ses étonnements faciles et puis... le hammam, le café étant ouvert au public, il y viendra. Dans le petit souk, il prendra goût aux finesses des tapis, du cuir, du métal travaillé. Il connaîtra des formes, des lignes, des couleurs dont l'assemblage, souvent encore, lui est inconnu. Il apprendra dans les jardins la valeur du silence. Avec la surprenante invite qui montera dans le ciel frissonnant, peut-être des imaginations fuiront vers l'immobilité des ciels, vers des soleils plus forts, enchantées par une vision de la plus grande France.

* * *


L'idée qui a présidé à la fondation de l'Institut musulman n'est pas nouvelle. En 1767, Louis XV et le sultan Mohammed ben Abdallah signaient un traité de paix dans lequel il était dit que "les consuls français auraient le droit d'avoir dans leur maison un endroit réservé à leurs prières et à leurs lectures religieuses ; que ceux qui voudraient, parmi les chrétiens, quels qu'ils soient, se rendre à la maison du consul pour les lectures et les prières n'en seraient empêchés par personne et que, de même les sujets de notre Seigneur - que Dieu le protège -, s'ils étaient établis dans le pays de France, dans quelque ville que ce soit, nul ne pourrait les empêcher d'établir une mosquée pour leurs prières et leurs lectures religieuses".

En 1895, le Comité de l'Afrique française reprenait ce projet. Si Kaddour ben Ghabrit, ministre plénipotentiaire, président de la Société des Habous des Lieux Saints de l'Islam, l'a réalisé [2]. Le gouvernement de M. Briand, en 1920, ouvrit un premier crédit budgétaire de 500 000 francs. La Ville de Paris abandonna le terrain.

Les dons des musulmans de l'Afrique du Nord, du plus modeste au plus généreux, affluèrent. Le Maroc s'inscrivit d'abord pour 3 millions, et il ne faut pas s'étonner de cette confiance. Par l'oeuvre du maréchal Lyautey et de nos représentants dans l'Afrique du Nord, l'Islam "sent le sérieux et la gravité avec lesquels nous nous inclinons devant les manifestations de sa foi. Notre sympathie nous est dictée par un sentiment né de quinze siècles d'hérédité religieuse".

À ces paroles de Lyautey l'Africain, il convient d'ajouter celles qu'a prononcées M. Steeg en Algérie : "La France garde à la civilisation musulmane la déférence qui lui est due. Elle entend ne rien railler, ne rien troubler, ne rien effacer dans l'âme humaine de ce qui a contribué à la réconforter, à l'élever, à l'ennoblir".

En effet, la constatation réciproque d'un sentiment tel que la religion sincère doit unir dans le profond de l'esprit deux peuples dont l'un disposant des moyens matériels de la civilisation, prétend les répandre chez l'autre. Dans cette région élevée où tous les hommes aspirent, cette région emplie du souci de la vie future, "de cette affaire où il s'agit d'eux-mêmes, de leur éternité, de leur tout", les hommes de bonne volonté trouvent un terrain d'entente. Devant les intérêts de l'âme, les fluctuations de la politique ne jouent pas. Il est bon que l'on sache, sur la foi d'un de leurs observateurs les plus expérimentés, qu'une grande part de la confiance que les Musulmans font à la France vient de ce qu'ils ont reconnu que son peuple ne se détournait pas de ces inquiétudes supérieures. Elle respecte leurs traditions, s'intéresse au relèvement de l'art religieux, à la conservation de ses monuments.

Aujourd'hui, les millions nécessaires à l'édification de l'institut sont versés par l'Afrique musulmane entière. Le monument s'achève. Si, pour son entretien, Si Kaddour ben Ghabrit a l'intention de faire appel à des fondations émanant de l'Islam mondial, il a mené à la vie son oeuvre féconde. La mosquée à Paris est le signe durable de l'amitié de la France pour l'Islam qui, aux heures pressantes de la grande guerre, a su lui donner la vie de ses enfants.

Nancy George
30 octobre 1925
l'Illustration, n° 4315, 14 novembre 1925

 

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notes et commentaires

 

notes

[1] Cette formule rappelle étrangement la phrase de Maurice Colrat, sous-secrétaire d'État à la Présidence du Conseil, qui représentait le gouvernement lors de la cérémonie du 1er mars 1922 (orientation du mihrab) : "Quand il s'érigera au-dessus des toits de la ville, le minaret que vous allez construire à cette place, il ne montera vers le beau ciel nuancé de l'Île-de-France, qu'une prière de plus, dont les tours catholiques de Notre-Dame ne seront point jalouses." Phrase que l'on attribue souvent par erreur à Lyautey qui l'a citée dans son discours du 19 octobre 1922. Nancy George a peut-être omis de mentionner le véritable inspirateur de sa formule...

[2] Ce n'est pas exactement le projet du Comité de l'Afrique française que ben Ghabrit a réalisé mais plutôt celui de Paul Bourdarie et de la Revue Indigène d'une part, et celui du ministère des Affaires étrangères, d'autre part. Il est vrai, cependant, que la filiation avec l'initiative avortée de 1895 est revendiquée par Bourdarie.

* l'orthographe a été respectée : moghrébines pour maghrébines, beurnouss pour burnous...

 

images

La mention de "A. Boiry" comme auteur des aquarelles est une erreur, probablement une faute typographique. Il suffit de regarder attentivement les dessins pour reconnaître la signature "C. Boiry". Il s'agit bien de Camille Boiry (1871-1954), peintre connu, qui fut membre de la Société Coloniale des Artistes français.
L'aquarelle des travaux vus de la rue Geoffroy Saint-Hilaire date du 11 juillet 1924, celle du patio date du 15 juillet 1925. Entre les deux, comme on peut le voir, le minaret est terminé.
Camille Boiry, né à Rennes, avait produit et exposé plusieurs oeuvres bretonnes. En 1920, il avait pu se rendre au Maroc et visiter les villes impériales. Les peintures de ce voyage furent exposées à Paris à partir du 26 avril 1922 chez le galeriste Le Goupy.

En 1920, Camille Boiry réalisa une affiche pour l'emprunt à 6% du Crédit foncier d'Algérie et de Tunisie :

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Camille Boiry, affiche, 1920

 

texte

Mme Nancy George est un auteur qui publie dans les années 1920 et 1930. À l'époque de l'article sur la Mosquée de Paris, paraissent ses récits de voyage sous le titre Maroc-la-rouge ou les enseignements de l'Islam (1922). Son roman, Les esclaves de Méquinez, écrit au cours de l'année 1924 et publié en 1925, évoque la vie des esclaves chrétiens emmenés de Salé à Meknès sous le règne du sultan Moulay Ismaïl. L'ouvrage est préfacé par les frères Jérôme et Jean Tharaud.
Puis elle signe dans dans l'Illustration en 1926 : "Marrakech, ville de tourisme, capitale du sud marocain. La salle des tombeaux des Chérifs saadiens".
En 1928, l'éditeur Fayard publiait un autre roman, Le rival singulier. Viennent ensuite surtout des nouvelles éditées par l'Illustration ou la Petite Illustration (La Chalézane, 1929 ; Jeux d'été, 1931 ; Une aventure de Don Juan, 1935, Cinq à Sept, 1937).
Elle est donc familière de la vie marocaine, connue par des voyages et par un accès livresque.
Dans l'article de l'automne 1925, retranscrit ci-dessus, le propos de Nancy George révèle les lieux communs sympathiques d'une vision "exotique" du monde de l'Islam. Sans lui concéder totalement non plus une admiration exclusive.
Il est dit, par exemple, que cette architecture "n'a point de chance de se répandre" car elle répond aux besoins de "déracinés" mais pas des natifs de France : "nous ne pourrons pas, de longtemps encore, nous empêcher de désirer, sous les moires du ciel, parmi les frondaisons mouillées, la maison de granit bretonne ou le chalet normand ; de préférer, pour le monument qui doit surgir du flottement des nuages et s'envelopper de brumes, le grand degré de l'Orangerie à Versailles, les contours de la place Vendôme à ceux de la porte de l'Exposition sur la place de la Concorde." On sent le tropisme "naturel" d'un héritage culturel plus familier, mais l'empathie pour l'Islam l'emporte cependant.

Michel Renard

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14 novembre 2008

tapis persan à la Mosquée de Paris

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tapis offert par le Shah de Perse à la Mosquée de
Paris en 1927 et destiné à la salle de prière

 

la Perse et la Mosquée de Paris

en 1926 et 1927



Question

Representant de l'Iran lors de l'inauguration de la Mosquée de Paris
Bonjour
J'aimerais savoir qui représentait l'Iran lors de la cérémonie d'inauguration de la Mosquée de Paris. Reza Shah avait offert un tapis lors de cette inauguration. Pourriez vous me confirmer si Javad Zahir ol Eslam a représenté l'Iran lors de cette cérémonie ?
Merci de vos éclaircissements.

Ameneh Zahir
posté le 1er octobre 2008

 

Réponse

Bonjour,

Le tapis offert par Reza Shah Pahlavi, qui appartenait au palais impérial de Golestan à Téhéran et qui avait été tissé par la fabrique de Djanchaghan, ne fut pas remis lors de l'inauguration en juillet 1926 mais quelques mois plus tard, le 12-janvier 1927. À cette occasion, la personne que vous évoquez n'est pas citée parmi les membres de la légation de Perse. L'envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire de Perse était Mirza Assadollah Khan Assad-Bahador. Il était acompagné de Farrokh Khan Braghon, premier secrétaire ; de Mir Nalsrollah Khan Entezam-Wesiry, deuxième secrétaire-; et du colonel Ali Khan Riazi, attaché militaire.

Michel Renard
vendredi, 14 novembre 2008 21:40

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Reza Shah Pahlavi (1925-1941)

 

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palais de Golestan, Téhéran

 

 

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11 juillet 2008

la kouba de Nogent reconstruite...!

photo_Kouba_Ngent

 

la kouba du cimetière de Nogent (1919)

va être reconstruite

 

À la suite d'une nouvelle démarche entreprise directement auprès du Président de la République, M. Nicolas Sarkozy, par l'association Études Coloniales, le gouvernement a manifesté son accord pour la reconstruction de la kouba de Nogent-sur-Marne. Le ministère des Anciens Combattants a saisi la Préfecture du Val de Marne et une première réunion s'est tenue le lundi 23 juin 2008 en mairie - cette dernière ayant approuvé ce projet déjà depuis l'année dernière.

Ainsi, quatre ans après la découverte de la correspondance entre le consul Émile Piat et l'officier Jean Mirante du Gouvernement général d'Algérie (Affaires indigènes) au Centre des archives d'Outre-mer à Aix-en-Provence, la mémoire de ce geste de fraternité qui a abouti à l'élévation de la kouba lors de la Première Guerre mondiale, va être perpétuée par la restauration de l'édifice.

(suite de l'article à venir)

Michel Renard

 

lettre_Piat___Mirante
lettre du consul Émile Piat à Jean Mirante (Alger)

 

- Appel et souscription pour le reconstitution de la kouba de Nogent-sur-Marne (2007)

- Projet de reconstitution de la kouba (1919) du cimetière de Nogent-sur-Marne (Michel Renard, 2005)

- Versets du Coran sur la kouba de Nogent

- Lettre adressée à Hamlaoui Mekachera (9 mai 2005)

- Lettre adressée à Dalil Boubakeur (10 mai 2005)

- Réponse de Dalil Boubakeur (24 mai 2005)

 

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emplacement de la kouba dans le carré militaire musulman

 

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20 février 2008

une image de la kouba (cpa)

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une image de la kouba de Nogent

carte postale ancienne



cimeti_re_de_Nogent
"cimetière de Nogent-sur-Marne - Tombes des Coloniaux"
(transmise par Marc Cimpello, en 2008)

 

kouba Nogent cpa tombe des coloniaux
"cimetière de Nogent-sur-Marne - Tombes des Coloniaux" (trouvée en 2018)

 

 

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25 juillet 2007

Prisonniers arabes amenés sur l'île en 1882

Prisonniers_arabes_1882__2_

 

 

Prisonniers arabes

amenés sur l'île Sainte-Marguerite

en 1882


 

Daveau, gravure Illustration, prisonniers arabes amenés sur l'île Sainte-Marguerite
gravure tirée de l'Illustration et légendée : "Prisonniers arabes amenés à l'ïle
Sainte-Marguerite - d'après le croquis de M. Daveau, notre correspondant à Cannes"
 

 

Il y a quelques mois, j'ai trouvé à la vente une image intitulée : "Prisonniers arabes amenés à l'île Sainte-Marguerite. - D'après le croquis de M. Daveau, notre correspondant à Cannes". Il s'agit d'une image découpée dans l'Illustration ou dans Le Monde Illustré et destinée à un usage mercantile. Elle ne comporte pas de date.

On ne peut donc savoir si un article accompagnait cette image. Mais quelques éléments figurant au dos de celle-ci permettent de la situer :
- l'allusion à la représentation à la Comédie française de Barbérine, pièce de théâtre de Musset ;
- et l'annonce de la parution d'un opuscule de Georges Vicaire, Le récit du grand-père (souvenirs d'Alsace).
Ces événements datent de 1882.

La scène représente une douzaine d'hommes, vêtus de burnous blancs, sortant de deux barques et se dirigeant vers l'escalier qui mène au fort. Trois soldats les "accueillent" et deux autres hommes (civils ou soldats ?) s'affairent sur les barques.

Comme la légende indique "d'après le croquis de...", il est possible que cette scène ne soit pas le reflet fidèle de l'événement. Mais elle évoque le séjour dans la prison de Sainte-Marguerite des Algériens condamnés par le pouvoir colonial à la déportation en métropole dans les années 1880.

À cette époque, le ministère de la Guerre avait fait conduire des détenus algériens à Sainte-Marguerite et le photographe niçois Jean Gilletta avait réalisé un cliché édité sous forme de carte postale. (voir article).

Michel Renard
juillet 2007


On en trouve une reproduction dans une collection de gravures extraits de périodiques et de journaux illustrés du XIXe siècle recueillies par Charles Baude, sur Gallica BnF.


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